Philippe Comte de Flandres à Hildegarde (1175-1177)
Se préparant à partir pour la croisade, Philippe, comte de Flandres de 1168 à 1191, écrit à Hildegarde pour lui demander conseil. C'est un homme de grande influence, à la vie tumultueuse, au coeur des grands conflits politiques. Il participe deux fois aux croisades : une première fois en 1177 et une seconde fois en 1190. Il meurt de la peste un an après son arrivée en Terre Sainte, à Saint-Jean-d'Acre.
"Philippe, comte de Flandres et d'Alsace, salue dame Hildegarde, servante du Christ et l'assure de sa haute dilection.
Votre sainteté sait que je suis prêt à faire tout ce qui me semblera vous plaire, car votre sainte discipline et votre existence juste et droite ont bien souvent retenti à mes oreilles, plus douces que toute renommée. Bien que je sois un pécheur et un homme indigne, j'aime de tout mon coeur les serviteurs et les amis du Christ et je les honore volontiers d'hommages de toute sorte, en me souvenant de ce que disent les écritures : La prière fervente du juste a une grande efficacité. Aussi, je délègue auprès de la piété de votre grâce le présent porteur de cette lettre, qui est mon plus fidèle serviteur. Il parlera pour moi misérable pécheur, bien que j'aurais de loin préféré venir jusqu'à vous et vous parler moi-même ; mais les tâches qui m'incombent chaque jour sont si lourdes et si nombreuses, que je n'ai pu m'en libérer.
Le temps où je devrais me rendre en pèlerinage à Jérusalem approche, et il exige de moi une grande préparation ; je vous prie de bien vouloir daigner me donner avis à ce sujet par écrit. Je crois en effet que bien souvent la réputation de mon nom et de mes actes est parvenue jusqu'à vous et que j'ai grand besoin de la miséricorde divine. Aussi, je vous supplie instamment de mes prières les plus insistantes de bien vouloir intercéder auprès de Dieu en ma faveur, moi qui suis le plus misérable et le plus indigne des pécheurs. Humblement, je vous demande – pour autant que la miséricorde divine vous l'ait permis – d'interroger Dieu sur ce qui me serait utile. La lettre que vous remettrez au présent messager m'apprendra ce que je dois faire et comment je dois faire pour que le nom de la Chrétienté soit exalté à mon époque et pour que la terrible cruauté des Sarrasins soit humiliée. J'apprendrai aussi s'il me faudra rester en terre sainte ou revenir, selon ce que vous aurez peut-être entendu ou appris à mon sujet par la révélation divine – ou selon ce que vous allez apprendre.
Je vous salue en Christ, soeur aimée de dilection, sachez que je désire ardemment connaître votre avis et que j'ai la plus grande confiance en vos prières."
• Hildegarde von Bingen, Lettres, traduction du latin par Rebecca Lenoir, éd. Jérôme Millon, 2007.
• Hildegarde von Bingen, Lettres, traduction du latin par Rebecca Lenoir, éd. Jérôme Millon, 2007.
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